Commandezle texte de la piÚce de théùtre éloge de l'oisiveté de Bertrand Russell. Livraison en 48 h. X Fermer. Recherche avancée. Effacer les filtres. nb. Femmes nb. Hommes nb. Personnages Durée Afficher/masquer plus d'options. Collection
Ainsi que la plupart des gens de ma gĂ©nĂ©ration, j'ai Ă©tĂ© Ă©levĂ© selon le principe que l'oisivetĂ© est mĂšre de tous les vices. Comme j'Ă©tais un enfant pĂ©tri de vertus, je croyais tout ce qu'on me disait et je me suis ainsi dotĂ© d'une conscience qui m'a contraint Ă peiner au travail toute ma vie....A lire la suite de la traduction de Michel Parmentier Obtenezle livre Eloge de l'oisivetĂ© de Bertrand RUSSELL au format PDF sur E.Leclerc. Ainsi que la plupart des gens de ma gĂ©nĂ©ration, jĂąâŹâąai Ă©tĂ© Ă©levĂ© selon le principe que lĂąâŹâąoisivetĂ© est mĂšre de tous les vices. Comme jĂąâŹâąĂ©tais un enfant pĂ©tri de vertu, je croyais tout ce quĂąâŹâąon me disait, et je me suis ainsi dotĂ© dĂąâŹâąune conscience qui mĂąâŹâąa contraint Ă peiner au travail toute ma ĂąâŹÂŠPour parler sĂ©rieusement, ce que je veux dire, cĂąâŹâąest que le fait de croire que le TRAVAIL en lettres majuscules dans le texte est une vertu est la cause de grand maux dans le monde moderne, et que la voie du bonheur et de la prospĂ©ritĂ© passe par une diminution mĂ©thodique du travail.ĂąâŹÂŠIl existe deux types de travailĂ le premier consiste Ă dĂ©placer une certaine quantitĂ© de matiĂšre se trouvant Ă la surface de la Terre, ou dans le sol mĂÂȘmeĂ ; le second, Ă dire Ă quelquĂąâŹâąun dĂąâŹâąautre de le faire. Le premier type de travail est dĂ©sagrĂ©able et mal payĂ©. Le second type est agrĂ©able et trĂšs bien payĂ©. Le second type de travail peut sĂąâŹâąĂ©tendre de façon illimitĂ©eĂ il y a non seulement ceux qui donnent des ordres, mais aussi ceux qui donnent des conseils sur le genre dĂąâŹâąordres Ă donner.ĂąâŹÂŠQuand je suggĂšre quĂąâŹâąil faudrait rĂ©duire Ă quatre le nombre dĂąâŹâąheures de travail, je ne veux pas laisser entendre quĂąâŹâąil faille dissiper en pure frivolitĂ© tout le temps quĂąâŹâąil reste. Je veux dire quĂąâŹâąen travaillant quatre heures par jour, un homme devrait avoir droit aux choses qui sont essentielles pour vivre dans un minimum de confort, et quĂąâŹâąil devrait pouvoir disposer de son temps comme bon lui semble.ĂąâŹÂŠAutrefois, il existait une classe oisive assez restreinte et une classe laborieuse plus considĂ©rable. La classe oisive bĂ©nĂ©ficiait dĂąâŹâąavantages qui ne trouvaient aucun fondement dans la justice sociale, ce qui la rendait nĂ©cessairement despotique, limitait sa compassion, et lĂąâŹâąamenait Ă inventer des thĂ©ories qui pussent justifier ses privilĂšges. Ces caractĂ©ristiques flĂ©trissaient quelque peu ses lauriers, mais, malgrĂ© ce handicap, cĂąâŹâąest Ă elle que nous devons la quasi totalitĂ© de ce que nous appelons la civilisation. Elle a cultivĂ© les arts et dĂ©couvert les sciencesĂ ; elle a Ă©crit les livres, inventĂ© les philosophies et affinĂ© les rapports sociaux. MĂÂȘme la libĂ©ration des opprimĂ©s a gĂ©nĂ©ralement reçu son impulsion dĂąâŹâąen haut. Sans la classe oisive, lĂąâŹâąhumanitĂ© ne serait jamais sortie de la barbarie.ĂąâŹÂŠLes mĂ©thodes de production, modernes, nous ont donnĂ© la possibilitĂ© de permettre Ă tous de vivre dans lĂąâŹâąaisance et la sĂ©curitĂ©. Nous avons choisi, Ă la place, le surmenage pour les uns et la misĂšre pour les autresĂ en cela, nous nous sommes montrĂ©s bien bĂÂȘtes, mais il nĂąâŹâąy a pas de raison pour persĂ©vĂ©rer dans notre bĂÂȘtise indĂ© Russell Ălogede lâoisivetĂ© 1 Ainsi que la plupart des gens de ma gĂ©nĂ©ration, jâai Ă©tĂ© Ă©levĂ© se- lon le principe que lâoisivetĂ© est mĂšre de tous vices. Comme jâĂ©tais un enfant pĂ©tris de vertu, je croyais tout ce quâon me disait, et je me suis ainsi dotĂ© dâune conscience qui mâa contraint Ă peiner au travail toute ma vie. Pascale Borrel Texte intĂ©gral 1Le verbe vaquer, dans sa forme intransitive, exprime la cessation dâune activitĂ©, un temps mort inscrit dans celui, continu, du travail. La forme active que lâemploi du verbe impose attribue au sujet qui vaque une pratique singuliĂšre celle de faire rien. Cette vacance peut ĂȘtre causĂ©e par des circonstances extĂ©rieures ou par une incapacitĂ© du sujet ou encore par une volontĂ©. Dans le contexte de la pratique de lâart, le suspend de lâactivitĂ© peut intervenir dans le processus de fabrication comme attente imposĂ©e par des conditions pratiques et techniques ; ou bien, ce suspend peut ĂȘtre lâeffet dâun Ă©tat dâĂąme », dâune tension sclĂ©rosante que traduit, par exemple, le dĂ©sĆuvrement mĂ©lancolique ; ou encore, il peut ĂȘtre la marque dâun parti pris consistant Ă faire de la vacance une composante de lâĆuvre. Câest de ce parti pris quâil sera question ici, celui qui consiste pour lâartiste Ă se dĂ©finir comme un ĂȘtre inoccupĂ©. La paresse dĂ©clarĂ©e ou lâimmobilitĂ© improductive sont des expressions de cette vacance dont il sâagira de montrer la portĂ©e poĂ©tique et critique. 1 1Man Ray citĂ© par Bernard MarcadĂ©, Marcel Duchamp, Paris, Flammarion, 2007, p. 213. Jâavais remarquĂ© que le panneau de Duchamp nâĂ©tait Ă©clairĂ© que par une seule ampoule, sans abat-jour ; mais je savais par expĂ©rience que cela nâavait pas dâimportance puisquâil sâagissait de photographier un objet immobile. Lâappareil Ă©tait installĂ© sur pied, les rĂ©sultats seraient satisfaisants, pourvu que le temps dâexposition fĂ»t assez long. En ajustant lâobjectif, jâavais une vue plongeante sur le panneau, qui ressemblait Ă un Ă©trange paysage vu par un oiseau. Le panneau Ă©tait poussiĂ©reux. Des petits bouts de serviettes en papier et dâouatage de coton, qui avaient servi Ă nettoyer les Ă©lĂ©ments terminĂ©s, ajoutaient au mystĂšre de lâĆuvre. [âŠ] Lâexposition serait fort longue, aussi jâouvris lâobturateur et nous sortĂźmes pour manger. Nous revĂźnmes une heure plus tard et je fermai lâ 2 Man Ray dĂ©cide de faire cette photographie dans le contexte de la SociĂ©tĂ© Anonyme, Inc. que Katheri ... 3 Marcel Duchamp citĂ© in ibid., p. 213. Man Ray relate ici les conditions dans lesquelles il a rĂ©alisĂ© en 1920 la photographie2 que Duchamp intitulera Ălevage de poussiĂšre. Le panneau » est le Grand Verre, disposĂ© Ă lâhorizontale dans lâatelier new-yorkais faiblement Ă©clairĂ©. Duchamp a dĂ©cidĂ© de laisser la poussiĂšre sây accumuler puis de la fixer avec du vernis afin que certaines formes aient cette sorte de couleur »3. 4 On peut penser Ă des Ćuvres aussi diffĂ©rentes que certains films de Warhol Empire, Sleep, Screen T ... 2Lâexistence de cette photographie suppose des mises en suspend de lâactivitĂ© celle quâexigent le dĂ©pĂŽt de la poussiĂšre et celle qui dĂ©pend du long temps de pose. Ces conditions de fabrication permettent dâĂ©tablir une relation entre Ălevage de poussiĂšre et de nombreuses Ćuvres dont la production impose un temps de dĂ©cantation, pendant lequel travailler consiste Ă attendre que les choses se fassent »4. Ces mĂ©thodes de travail qui font de la gĂ©nĂ©ration de lâĆuvre un processus partiellement indĂ©pendant de lâaction de lâartiste participent dâune conception de la pratique de lâart celle qui durant le XXe siĂšcle sâest employĂ©e Ă dĂ©finir lâĆuvre comme entitĂ© impersonnelle, disjointe de la singularitĂ© de son auteur. 5 MarcadĂ©, Marcel Duchamp, op. cit., p. 121. 6 Le Grand Verre devait revenir aux Arenberg qui avaient apportĂ© Ă Duchamp une aide matĂ©rielle. En 19 ... 7 MarcadĂ©, Marcel Duchamp, op. cit., p. 241. 3Toutefois, câest aussi la relation que Duchamp a entretenue avec le Grand Verre et avec le travail en gĂ©nĂ©ral, quâĂlevage de poussiĂšre manifeste. Quand, en 1920, Man Ray rĂ©alise la photographie de sa surface poussiĂ©reuse, lâĆuvre est entreprise depuis dĂ©jĂ cinq ans. Duchamp la nomme ma grande saloperie »5, indiquant ainsi le travail important que sa conception et sa rĂ©alisation exigent et un dĂ©sintĂ©rĂȘt croissant pour cette tĂąche laborieuse. Les annĂ©es qui lui sont consacrĂ©es constituent une durĂ©e discontinue le travail est mis en suspend par la rĂ©alisation dâautres Ćuvres, par des voyages, par les occupations mondaines new-yorkaises. Cette exĂ©cution qui sâĂ©ternise croise en 1923 des circonstances6 dont Duchamp profite pour dĂ©cider ou plutĂŽt constater lâ inachĂšvement dĂ©finitif »7 du Grand Verre. La reprĂ©sentation photographique de la poussiĂšre peut ainsi renvoyer Ă la relation Ă©troite que lâĆuvre de Duchamp Ă©tablit entre implication et dĂ©sinvestissement, entre labeur et oisivetĂ©. Le Grand Verre, en effet, est Ă la fois le produit dâun travail dense, et celui de sa nonchalante mise en suspend. 4Dans un essai intitulĂ© Laisser pisser le mĂ©rinos, Bernard MarcadĂ© a fait apparaĂźtre lâinsistance avec laquelle Duchamp a exprimĂ© le rien faire », la vacance. Ă Francis SteegmĂŒgler, par exemple, il dĂ©clare 8 Marcel Duchamp citĂ© in Bernard MarcadĂ©, Laisser pisser le mĂ©rinos, Paris, LâĂchoppe, 2006, p. 11. Au fond, je nâai rien fait depuis 1923, vous pouvez le dire. Est-ce quâil faut faire un minimum de choses ? Vous savez comme le temps passe. Les guerres surviennent. Pour une raison ou pour une autre on ne travaille Ou encore, il dit Ă Pierre Cabanne 9 Marcel Duchamp, citĂ© in ibid., p. 19. Je nâai pas connu [âŠ] lâeffort de produire, la peinture nâayant pas Ă©tĂ© pour moi un dĂ©versoir, ou un besoin impĂ©rieux de mâexprimer. Je nâai jamais eu cette espĂšce de besoin de dessiner le matin, le soir, tout le temps, de faire des croquis, 10 Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray, Paris, Gallimard, 1992, p. 368. 11 Walter Benjamin, Paris. Capitale du XIXe siĂšcle, Paris, Cerf, 1989, p. 441. La maniĂšre dont Duchamp dit se tenir Ă distance du travail est ambivalente il y est Ă la fois question de paresse et de nonchalance constitutives, et de pondĂ©ration, dâimproductivitĂ© distinguĂ©e. Quand Duchamp assimile le fait de ne rien faire Ă une maniĂšre de retrait raffinĂ©, câest dans la tradition dandy quâil sâinscrit. Si le dandysme, tel quâil sâest manifestĂ© au XIXe siĂšcle, est associĂ© Ă un soin de la mise vestimentaire, câest aussi une volontĂ© de se tenir loin des activitĂ©s laborieuses qui le caractĂ©rise. Oscar Wilde fait dire Ă Lord Henry Ă lâadresse de Dorian Gray Je suis ravi que vous nâayez jamais rien fait, jamais sculptĂ© une statue, jamais peint un tableau, jamais produit quoi que ce soit en dehors de vous-mĂȘme »10. La construction de soi, qui constitue lâĆuvre du dandy, participe dâune oisivetĂ© celle-ci est lâune des marques qui le distingue de la masse, soumise elle Ă lâobligation matĂ©rielle et morale de travailler. La vacance du dandy nâest pas le dĂ©sĆuvrement, le mal ĂȘtre mĂ©lancolique ; câest dâune oisivetĂ© quâil sâagit, oisivetĂ© Ă pratiquer, Ă cultiver et Ă rendre visible, selon une mise en scĂšne souvent appuyĂ©e. Walter Benjamin rapporte quâ en 1839, il Ă©tait Ă©lĂ©gant dâemmener une tortue quand on allait se promener »11. Par son caractĂšre grotesque, cette dĂ©ambulation dans les passages parisiens rĂ©duit le thĂšme poĂ©tique de la flĂąnerie Ă lâostentatoire exhibition de la lenteur et de lâoisivetĂ©. De maniĂšre analogue, on peut considĂ©rer quâune part de lâactivitĂ© et des propos de Duchamp a eu comme finalitĂ© de mettre en Ă©vidence sa distance avec le faire » artistique lâengouement pour le jeu dâĂ©checs, le choix de rendre secrĂšte la rĂ©alisation dâĂtant donnĂ©s⊠ont pour effet dâassocier Ă la figure de lâartiste la distinction du dilettante. 12 Marcel Duchamp citĂ© par Bernard MarcadĂ©, Laisser pisser le mĂ©rinos, op. cit., p. 43. 13 Dans une note, non datĂ©e des annĂ©es soixante, il y fait rĂ©fĂ©rence et pense Ă la crĂ©ation dâun hos ... 5Dans les propos de Duchamp, ne rien faire » ne relĂšve pas seulement dâun parti pris artistique ; câest Ă©galement la manifestation dâun penchant commun Jâaurais voulu travailler, mais il y avait en moi un fond de paresse Ă©norme. Jâaime mieux vivre, respirer que travailler »12. La paresse est prĂ©sentĂ©e comme lâattribut du vellĂ©itaire mais aussi comme la source dâun plaisir hĂ©doniste. Duchamp dit avoir Ă©tĂ© marquĂ© par la lecture quâil a faite, en 1912, de lâessai de Paul Lafargue Le Droit Ă la paresse13. 14 Paul Lafargue, Le Droit Ă la paresse, Paris, Allia, 1999, p. 35. 15 Ibid., p. 12. 16 Voir Ă ce propos Anson Rabinbach, Le Moteur humain. LâĂ©nergie, la fatigue et les origines de la mod ... 6Paru en feuilleton dans le quotidien LâĂgalitĂ©, en 1881, Le Droit Ă la paresse nâa toutefois pas pour objet dâexposer les douceurs du farniente. Il est une critique dâun contexte Ă©conomique et social, celui de la sociĂ©tĂ© industrielle de cette fin du XIXe siĂšcle. Lafargue y explique la nĂ©cessitĂ© de mater la passion extravagante des ouvriers pour le travail »14, parce que le travail est la cause de toute dĂ©gĂ©nĂ©rescence intellectuelle, de toute dĂ©formation organique »15, et surtout parce que la puissance de production doit ĂȘtre canalisĂ©e pour assurer un juste Ă©quilibre entre richesses et consommation. Dans le cadre de cette analyse socio-Ă©conomique, lâintroduction de la notion de paresse » semble un peu incongrue. Manifestement, câest pour sa portĂ©e provocatrice que lâauteur lâutilise ainsi que pour sa valeur symbolique. La paresse, en effet, permet Ă Lafargue dâinscrire son projet dans une tradition, dâen faire percevoir les fondements culturels, qui rĂ©sident dans la sociĂ©tĂ© paĂŻenne, charnelle, joyeuse que lâĆuvre de Rabelais prĂ©sente et, antĂ©rieurement, dans un Ăge dâor » antique oĂč le travail est une valeur nĂ©gative. Argos dĂ©signe celui qui ne travaille pas », le citoyen, en opposition Ă lâesclave qui, lui, se consacre Ă la gestion de la vie de la communautĂ©. Ou encore, cette dĂ©prĂ©ciation du travail est incarnĂ©e par la figure du poĂšte grec dont lâactivitĂ© est une oisivetĂ© hĂ©roĂŻque, un don des dieux. Sâen remettre Ă cet Ăge dâor » câest, pour Lafargue, rompre avec la culture chrĂ©tienne qui dĂ©finit la paresse comme manquement aux obligations spirituelles et sociales16 ; câest envisager les effets positifs de lâoisivetĂ© sur le plan collectif, en matiĂšre dâĂ©conomie et de santĂ© publique. 17 Par exemple Samuel Johnson, Le Paresseux ensemble de textes parus entre 1758 et 1760, Casimir M ... 18 ClĂ©ment Pansaers, Apologie de la paresse, Paris, Allia, 1986. 19 Robert Louis Stevenson, Une apologie des oisifs, Paris, Allia, 2001, p. 15. 7Duchamp, lui, parle de la paresse comme expĂ©rience subjective, comme plaisir dâhabiter le temps vacant, plaisir que de nombreux auteurs ont mis en Ă©vidence17. Si leurs essais, leurs pamphlets en envisagent la portĂ©e politique, ils insistent tout autant sur les plaisirs sensoriels quâelle procure. Dans son Apologie de la paresse, ClĂ©ment Pansaers Ă©crit O ! Le luxe imprĂ©vu de la fainĂ©antise ! La grĂšve gĂ©nĂ©rale sur une grĂšve ensoleillĂ©e ! »18. Quand Stevenson Ă©voque lâĂ©cole buissonniĂšre sous les traits convenus de lâinsoumission enfantine aux rĂšgles de lâapprentissage scolaire, cette conduite paresseuse est conçue comme pratique hĂ©doniste, comme ouverture du sujet Ă la chaleur palpitante de la vie »19. La paresse est lâobjet de diffĂ©rentes approches, de diffĂ©rentes projections ; elle apparaĂźt ainsi comme une notion mallĂ©able, offerte Ă la construction de reprĂ©sentations, de figures. 20 Roland Barthes, Osons ĂȘtre paresseux », Le Grain de la voix, Entretiens 1962-80, Paris, Le Seul, ... 21 Ibid., p. 358. 22 Ibid., p. 360. 23 Roland Barthes, Le Neutre. Cours au CollĂšge de France 1977-78, Paris, Seuil, 2002, p. 232. 24 Ibid. 25 RĂ©sumĂ© de Roland Barthes pour lâannuaire du CollĂšge de France », in ibid. p. 261. Les Ă©tats et co ... 8Câest ce que lâon perçoit dans une interview donnĂ©e par Barthes au Monde Dimanche en 1979, intitulĂ©e Osons ĂȘtre paresseux »20. Ce nâest pas dâun droit Ă la paresse » quâil y est question mais dâune capacitĂ© dont Barthes se dit dĂ©pourvu il dit ne pas savoir rien faire, contrairement au concierge parisien quâil voyait, quand il Ă©tait enfant, sortir une chaise dans la rue le soir pour sâasseoir sans rien faire »21, ou contrairement au cancre qui ne participe pas, nâest pas exclu, qui est lĂ , un point câest tout, comme un tas »22. La maniĂšre dont Barthes qualifie le statisme du concierge ou du cancre rappelle les remarques quâil consacre Ă sâasseoir » dans le zen, dans son cours Le Neutre en 1977-78 au CollĂšge de France. Barthes indique que, dans cette branche du bouddhisme, sâasseoir » est un acte qui exprime lâidĂ©e de non-profit [âŠ] de non-dĂ©sir de prendre »23 ; et lâauteur Ă©tablit une relation entre cette Ă©nergie mĂ©ditative et la paresse lâassis pense, veille [âŠ] jouit dans la paresse. âź RĂȘve de toute une journĂ©e, une fois, complĂštement assis sans aucune demande, tĂąche, responsabilitĂ© »24. Dans le contexte de son cours, Barthes a choisi, pour dĂ©finir le neutre, de prĂ©senter diffĂ©rents Ă©tats et conduites qui suspendent le conflit »25. La paresse ne figure pas parmi ceux-ci ; mais le mode selon lequel Barthes parfois y fait allusion, indique que câest Ă un Ă©tat de suspend des conflits » quâil lâassocie. La paresse nâest pas la mollesse contre laquelle il faut lutter, mais un Ă©quilibre paisible, une quiĂ©tude de lâesprit que lâimmobilitĂ© du corps manifeste. 9Cette maniĂšre de vacance constitue, pour certains artistes, un objet de reprĂ©sentation ; lâĆuvre se fonde alors sur la relation que le corps immobile de lâartiste entretient avec un contexte spatial et temporel. Le 8 fĂ©vrier 1965, Filliou prĂ©sente au CafĂ© Au Le secret de la crĂ©ation permanente absolue, dont il rapporte le dĂ©roulement en ces termes Moi, mâadressant au public mon nom est Filliou, donc le titre de mon poĂšme est le Filliou idĂ©al Câest un poĂšme-action et je vais le prĂ©senter Ne rien dĂ©cider Ne rien choisir Ne rien vouloir Ne rien possĂ©der Conscient de soi Pleinement Ă©veillĂ© TRANQUILLEMENT ASSIS SANS RIEN FAIRE Puis je me suis assis en tailleur sur la scĂšne, immobile et silencieux 26 Filliou, comme Barthes, fait rĂ©fĂ©rence au zen ; tous deux mentionnent ce poĂšme Zenrin Assis pai ... Le poĂšme-action de Filliou consiste Ă Ă©noncer les fondements et le sens26 de cette immobilitĂ© avant de la produire et de la tenir. Filliou théùtralise lâinactivitĂ© en la mettant littĂ©ralement en scĂšne, en instaurant avec le public une relation frontale dont le caractĂšre direct rĂ©side dans la prise de parole puis dans un face Ă face silencieux installĂ© dans la durĂ©e. Câest Ă©galement ce rapport frontal que Kim Sooja Ă©tablit lors dâune suite de performances rassemblĂ©es sous le titre A Needle Woman 1999-2001 et 2005. Dans une dizaine de grandes villes Londres, Shanghai, Lagos, Mexico, JĂ©rusalemâŠ, Kim Sooja sâest tenue sans bouger, une vingtaine de minutes, au milieu dâun flot souvent trĂšs dense de passants. Les vidĂ©os qui rendent compte de ces situations, filmĂ©es au tĂ©lĂ©objectif, ralenties Ă la projection, montrent invariablement lâartiste de dos, cadrĂ©e Ă la taille. Le point de vue adoptĂ© permet de mettre en Ă©vidence lâavancĂ©e des passants face Ă ce corps statique. Celui-ci apparaĂźt Ă la fois comme lâobstacle et lâaimant de ces individus en mouvement. 10Par le rapport frontal quâils Ă©tablissent avec un public, avec des passants, Robert Filliou et Kim Sooja indiquent la relation que leur immobilitĂ© cherche Ă Ă©tablir tranquillement assis » ou plantĂ© hiĂ©ratiquement, le corps est le signe, par son inactivitĂ©, dâun investissement mental, dâune concentration. Le face-Ă -face que les artistes instaurent indique que cet exercice mĂ©ditatif sâalimente de la prĂ©sence de ceux qui sây confrontent, et cherche en retour Ă les toucher. 11Dans ses interviews, Kim Sooja insiste sur la relation dâempathie avec le rĂ©el, avec les individus, qui anime son travail. Cette empathie sâexprime de maniĂšre appuyĂ©e dans les performances intitulĂ©es A Beggar Woman et A Homeless Woman 2000-2001, rĂ©alisĂ©es elles aussi dans diffĂ©rentes grandes villes. Lâartiste y adopte la position du mendiant et des personnes qui dorment dans la rue pour, dit-elle, ressentir ces Ă©tats de grande prĂ©caritĂ©. Les images de ces performances soulignent le caractĂšre ambigu de la situation le corps de lâartiste, parfaitement statique, traduit lâindigence en une pose ; il assimile les signes de la pauvretĂ© Ă ceux dâun exercice mĂ©ditatif. 12Câest Ă©galement la rencontre perturbante de deux registres que Turista de Francis AlĂżs Ă©tablit. Il sâagit dâune photographie montrant lâartiste sur une place de Mexico, parmi un groupe dâartisans qui proposent leurs services, indiquant par un panneau posĂ© Ă leurs pieds, leurs compĂ©tences de plombiers, de charpentiers, de peintres en bĂątiment⊠Sur le panneau dâAlĂżs on peut lire Turista ». LâĆuvre fait se cĂŽtoyer abruptement lâinactivitĂ© subie du sans-emploi, et celle, choisie, du touriste en vacances. Elle juxtapose deux temporalitĂ©s diffĂ©rentes attendre un travail et passer le temps. La scĂšne montre bien quâil ne sâagit pour AlĂżs de faire lâexpĂ©rience dâune situation sociale Ăąpre mais, dans la proximitĂ© de celle-ci, de chercher Ă dĂ©finir son statut dâartiste 27 Francis AlĂżs in Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, London, Phaidon, 2007, p. ... Lorsquâen 1994 je me suis postĂ© devant la cathĂ©drale, Ă cĂŽtĂ© du ZĂłcalo, avec une pancarte Ă mes pieds signalant touriste », je voulais dĂ©noncer mais aussi mettre Ă lâĂ©preuve mon propre statut dâĂ©tranger, de gringo. JusquâĂ quel point puis-je appartenir Ă cet endroit ? JusquâĂ quel point puis-je le juger ? Suis-je un participant ou seulement un observateur ? » En proposant mes services en tant que touriste au milieu de charpentiers et de plombiers, jâoscillais entre le loisir et le travail, entre la contemplation et lâ 28 AlĂżs est Belge, mais installĂ© depuis 1986 Ă Mexico. Dans la vidĂ©o intitulĂ©e Gringo 2003 ce statut ... 29 The paradox of praxis Sometimes doing something leads to nothing. Sometimes doing nothing leads ... LâĆuvre permet donc de qualifier lâinscription particuliĂšre dâAlĂżs dans un contexte social et Ă©conomique proposer ses compĂ©tences de touriste » câest dâune part rendre compte dâune extĂ©rioritĂ© dĂ©finitive28 ; et câest dâautre part distinguer lâactivitĂ© artistique de celle, nĂ©cessaire et efficace, du travailleur. Toutefois, lâĆuvre ne relĂšve pas de lâarrogance dandy vis-Ă -vis du labeur. PlutĂŽt, cette figure du touriste-artiste peut ĂȘtre mise en relation avec une conception du faire » qui fonde une bonne part du travail dâAlĂżs, et quâil a Ă©noncĂ©e sous la forme suivante Le paradoxe de la pratique parfois faire quelque chose ne mĂšne Ă rien. Parfois ne rien faire mĂšne Ă quelque chose »29. 13Ce paradoxe qui Ă©tablit une complĂ©mentaritĂ© entre activitĂ© laborieuse de peu dâeffets et inactivitĂ© fĂ©conde se manifeste dans plusieurs de ses Ćuvres, en particulier dans The Paradoxe of Praxis I 1997 et Looking up 2001. Dans la premiĂšre, AlĂżs pousse pendant prĂšs de 9 heures, un volumineux pain de glace dans les rues de Mexico, jusquâĂ ce quâil nâen reste quâune flaque dâeau. Dans Looking up, câest en se tenant nonchalamment debout au milieu de la place Santo Domingo, en regardant en lâair, quâAlĂżs produit quelque chose » un petit attroupement de passants qui, intriguĂ©s par son attitude, scrutent dans la mĂȘme direction que lui. 30 Francis AlĂżs, Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 14. 31 Ibid., p. 21. 32 CuauhtĂ©moc Medina, Fable Power », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 54. 33 Francis AlĂżs, Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 21. 34 Ibid., p. 21. 14Le rapport quâAlĂżs Ă©tablit entre lâactivitĂ© et ses effets ainsi que lâinactivitĂ© et les siens, dĂ©finit une mĂ©thode de travail dont la portĂ©e est tant poĂ©tique que critique. En effet, ce paradox of praxis » est pour lâartiste le moyen de rendre compte, sur un mode mĂ©taphorique, dâune situation Ă©conomique et culturelle, de montrer comment le syndrome de progrĂšs et le dogme de productivitĂ© sont vĂ©cus et compris au sud de la frontiĂšre US »30. Lâartiste constate que si de nombreux facteurs ont Ă©tĂ© rĂ©unis pour que ces pays entrent dans la modernitĂ©, il sây manifeste toutefois une rĂ©sistance interne »31. AlĂżs la perçoit, par exemple, dans la tĂ©nacitĂ© avec laquelle des pratiques anachroniques persistent dans la citĂ© malgrĂ© les projets de modernisation nĂ©olibĂ©raux. CuauhtĂ©moc Medina souligne, Ă ce propos, quâaprĂšs le tremblement de terre de 1985, Mexico a vu la reconstruction du quartier vernaculaire, prĂ©-moderne et lâĂ©mergence dâun usage non-administratif de la rue »32. La particularitĂ© de ce contexte rĂ©side dans une volontĂ© de demeurer dans une sphĂšre dâaction indĂ©terminĂ©e »33, de se dĂ©finir par des valeurs qui ne relĂšvent pas de lâefficacitĂ© Ă©conomique imposĂ©e. Cette sphĂšre dâaction indĂ©terminĂ©e » nâest pas de lâimmobilisme mais un processus que lâartiste qualifie de fuite en avant » et dont lâimage mĂ©taphorique est le mirage les programmes de dĂ©veloppement fonctionnent prĂ©cisĂ©ment Ă la maniĂšre dâun mirage, un but historique qui, Ă peine apparu Ă lâhorizon, sâĂ©vapore dans les airs »34. LâĆuvre intitulĂ©e A Story of Deception 2003-2006 est lâillustration de ce mouvement, la camĂ©ra montrant une avancĂ©e vers des mirages, vers des brillances sans cesse disparaissant. Ce film est donc le produit dâune action inefficace et obstinĂ©e ; ces attributs, AlĂżs prend le parti de les valoriser pour conjuguer dĂ©ception et dynamisme. 15Chercher Ă constituer un portrait de lâartiste en vacance », câest croiser les voies nombreuses, divergentes qui se proposent quand lâinactivitĂ© est inscrite ostensiblement au sein de la pratique de lâart dĂ©claration dâune souverainetĂ© artistique extraite des nĂ©cessitĂ©s du commun ; expression dâune disponibilitĂ© dâun sujet aux douceurs du farniente ; Ă©mission dâun investissement mental par lâimmobilitĂ© du corps ; mise en question de la notion dâefficacité⊠Le trait commun Ă ces diffĂ©rentes conceptions de la vacance rĂ©side dans lâarticulation que celle-ci permet dâĂ©tablir entre lâindividuel et le collectif, entre le poĂ©tique et le politique. Notes 1 1Man Ray citĂ© par Bernard MarcadĂ©, Marcel Duchamp, Paris, Flammarion, 2007, p. 213. 2 Man Ray dĂ©cide de faire cette photographie dans le contexte de la SociĂ©tĂ© Anonyme, Inc. que Katherine Dreier a fondĂ©e dans le but de faire connaĂźtre lâart moderne aux AmĂ©ricains ; voir ibid., p. 210. 3 Marcel Duchamp citĂ© in ibid., p. 213. 4 On peut penser Ă des Ćuvres aussi diffĂ©rentes que certains films de Warhol Empire, Sleep, Screen TestsâŠ, la sĂ©rie des Ă©crans de cinĂ©ma de Sugimoto, les peintures par pliage de Simon HantaĂŻ, les larves trichoptĂšres dâHubert Duprat⊠Ces Ćuvres prĂ©sentent comme trait commun la mise en place de conditions pratiques, Ă©lĂ©mentaires ou plus sophistiquĂ©es, qui demandent que pour un temps, lâartiste laisse un dispositif agir. 5 MarcadĂ©, Marcel Duchamp, op. cit., p. 121. 6 Le Grand Verre devait revenir aux Arenberg qui avaient apportĂ© Ă Duchamp une aide matĂ©rielle. En 1923, le couple quitte New York pour la Californie et vend lâobjet, trop fragile pour ĂȘtre transportĂ©, Ă Katherine Dreier. Câest lors de ce changement de propriĂ©taires que Duchamp signe lâĆuvre inachevĂ©e. 7 MarcadĂ©, Marcel Duchamp, op. cit., p. 241. 8 Marcel Duchamp citĂ© in Bernard MarcadĂ©, Laisser pisser le mĂ©rinos, Paris, LâĂchoppe, 2006, p. 11. 9 Marcel Duchamp, citĂ© in ibid., p. 19. 10 Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray, Paris, Gallimard, 1992, p. 368. 11 Walter Benjamin, Paris. Capitale du XIXe siĂšcle, Paris, Cerf, 1989, p. 441. 12 Marcel Duchamp citĂ© par Bernard MarcadĂ©, Laisser pisser le mĂ©rinos, op. cit., p. 43. 13 Dans une note, non datĂ©e des annĂ©es soixante, il y fait rĂ©fĂ©rence et pense Ă la crĂ©ation dâun hospice de paresseux », ibid., p. 48. 14 Paul Lafargue, Le Droit Ă la paresse, Paris, Allia, 1999, p. 35. 15 Ibid., p. 12. 16 Voir Ă ce propos Anson Rabinbach, Le Moteur humain. LâĂ©nergie, la fatigue et les origines de la modernitĂ©, Paris, La fabrique, 2004. 17 Par exemple Samuel Johnson, Le Paresseux ensemble de textes parus entre 1758 et 1760, Casimir Malevitch, La Paresse comme vĂ©ritĂ© effective de lâhomme, 1921, ClĂ©ment Pansaers, LâApologie de la paresse, 1917, Robert Louis Stevenson, Une apologie des oisifs, 1877, Bertrand Russel, Ăloge de lâoisivetĂ©, 1932⊠18 ClĂ©ment Pansaers, Apologie de la paresse, Paris, Allia, 1986. 19 Robert Louis Stevenson, Une apologie des oisifs, Paris, Allia, 2001, p. 15. 20 Roland Barthes, Osons ĂȘtre paresseux », Le Grain de la voix, Entretiens 1962-80, Paris, Le Seul, 1981, p. 356-363. 21 Ibid., p. 358. 22 Ibid., p. 360. 23 Roland Barthes, Le Neutre. Cours au CollĂšge de France 1977-78, Paris, Seuil, 2002, p. 232. 24 Ibid. 25 RĂ©sumĂ© de Roland Barthes pour lâannuaire du CollĂšge de France », in ibid. p. 261. Les Ă©tats et conduites que Barthes a choisis de traiter sont la Bienveillance, la Fatigue, le Silence, la DĂ©licatesse, le Sommeil, lâOscillation, la Retraite⊠26 Filliou, comme Barthes, fait rĂ©fĂ©rence au zen ; tous deux mentionnent ce poĂšme Zenrin Assis paisiblement, sans rien faire, / le printemps vient et lâherbe croĂźt dâelle-mĂȘme ». 27 Francis AlĂżs in Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, London, Phaidon, 2007, p. 11 reproduit et traduit en français in Francis AlĂżs. A Story of Deception, Bruxelles, Lannoo-Wiels, 2010, p. 41. 28 AlĂżs est Belge, mais installĂ© depuis 1986 Ă Mexico. Dans la vidĂ©o intitulĂ©e Gringo 2003 ce statut dâĂ©tranger est associĂ© Ă une situation de tension la camĂ©ra tenue par lâartiste entre en confrontation avec une meute de chiens belliqueux qui garde une maison dans une province centrale du Mexique. 29 The paradox of praxis Sometimes doing something leads to nothing. Sometimes doing nothing leads to something ». 30 Francis AlĂżs, Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 14. 31 Ibid., p. 21. 32 CuauhtĂ©moc Medina, Fable Power », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 54. 33 Francis AlĂżs, Conversation with Russell Ferguson », in Francis AlĂżs, op. cit., p. 21. 34 Ibid., p. 21. Auteur Est maĂźtre de confĂ©rences en arts plastiques Ă lâUniversitĂ© Rennes 2, membre de lâĂ©quipe dâaccueil Arts pratiques et poĂ©tiques EA 3208. Sa recherche concerne les relations entre pratique de lâart et Ă©criture, la temporalisation des images et les diffĂ©rentes formes de retrait de lâauteur. Dansce texte Russel ne fait pas vraiment l'Ă©loge de l'oisivetĂ©, mais il dit qu'il ne faut pas valoriser le travail Ă outrance. Travailler plus ce n'est pas une idĂ©e qui vient de soi, mais c'est un concept ancien qu'on a inculquĂ© aux peuples. Extrait de la publication Extrait de la publication Ăloge de lâoisivetĂ© Extrait de la publication Extrait de la publication ï± ï¶ ïą ï„ ïČ ïŽ ïČ ïĄ ïź ï€ ïČ ï” ïł ïł ï„ ïŹ ïŹ Ăloge de lâoisivetĂ© Traduit de lâanglais par ï ï© ïŁ ïš ï„ ïŹ ï°ïĄ ïČ ï ï„ ïź ïŽ ï© ï„ ïČ ï© ï€ ï© ïŽ ï© ïŻ ïź ïł ïĄ ïŹ ïŹ ï© ïĄ e , ï°ïĄïŹ ï„ ï ïĄ ï§ ïź ï„ , ï© ïČ ï© ïłïČ ï” ï„ ïš ïĄ ïČ ïŁ ï¶ ïČï°ï±ïČ Extrait de la publication ïŽ ï© ïŽ ïČ ï„ ïŻ ïČ ï© ï§ ï© ïź ïĄ ïŹ In Praise of Idleness La premiĂšre Ă©dition deĂloge de lâoisivetĂ©a paru enï±ïčïłïČ dansReview of Reviews. © Routledge&the Bertrand Russell Peace Foundation. © Ăditions Allia, Paris,ïČï°ï°ïČ,ïČï°ï±ïČpour la traduction française. Extrait de la publication ïĄ ï© ïź ïł ï©plupart des gens de ma gĂ©nĂ©-que la ration, jâai Ă©tĂ© Ă©levĂ© selon le principe que lâoi-sivetĂ© est mĂšre de tous vices. Comme jâĂ©tais un enfant pĂ©tri de vertu, je croyais tout ce quâon me disait, et je me suis ainsi dotĂ© dâune conscience qui mâa contraint Ă peiner au tra-vail toute ma vie. Cependant, si mes actions ont toujours Ă©tĂ© soumises Ă ma conscience, mes idĂ©es, en revanche, ont subi une rĂ©volu-tion. En effet, jâen suis venu Ă penser que lâon travaille beaucoup trop de par le monde, que de voir dans le travail une vertu cause un tort immense, et quâil importe Ă prĂ©sent de faire valoir dans les pays industrialisĂ©s un point de vue qui diffĂšre radicalement des prĂ©ceptes tra-ditionnels. Tout le monde connaĂźt lâhistoire du voyageur qui, Ă Naples, vit douze mendiants Ă©tendus au soleil câĂ©tait avant Mussolini, et proposa une lire Ă celui qui se montrerait le plus paresseux. Onze dâentre eux bondirent Extrait de la publication . 566 59 93 540 417 637 544 479